
Tour de France: Valentin Paret-Peintre, le "gringalet" devenu géant

Devenu géant mardi au sommet du Mont Ventoux, Valentin Paret-Peintre a longtemps été complexé par son gabarit de crevette qu'il compense, selon ses proches, par une "âme de leader" et une "grinta exceptionnelle".
Pris dans un tourbillon d'émotions, le Haut-Savoyard de 24 ans ne savait plus où donner de la tête sur le promontoire du Mont Chauve, quelques secondes après avoir remporté la plus belle victoire de sa carrière, la première d'un Français sur le Tour de France en 2025.
"Mont Ventoux, il n'y a que les grands qui gagnent ici", lui lance un soigneur de son équipe Soudal Quick-Step.
- Mont Ventoux", bredouille "VPP" en réponse, avant d'enlacer son coéquipier Ilan Van Wilder qui l'a aidé au prix d'un effort herculéen dans le final.
"Merci beaucoup, je te le rendrais mon pote", lui glisse-t-il à l'oreille, avant que Julian Alaphilippe ne lui tombe dans les bras et constate: "Pour un grimpeur, difficile de faire mieux."
Déjà vainqueur d'une étape du Giro l'an dernier et d'une étape au Tour d'Oman en début de saison, "VPP" a vécu mardi "le plus beau jour" de sa vie de coureur, lui qui est issu d'une famille de cyclistes avec son frère aîné Aurélien (29 ans) et leur sœur Maeva, qui fêtait ses 26 ans mardi.
Les deux frères, proches dans la vie et qui étaient dans la même équipe Decathlon-AG2R jusqu'à cet hiver, ont d'abord été entraînés par leur père, président du VC d'Annemasse, avant d'entrer au centre de formation à Chambéry.
- "Complexe" -
Dans une symbiose troublante, ils ont "pratiquement gagné les mêmes courses chez les jeunes", comme le rappelle Aurélien, vainqueur par exemple de la Classique des Alpes juniors en 2013, six ans avant "le petit".
Mais si leurs trajectoires se ressemblent, ils ont des physiques très différents, le cadet étant l'un des plus maigres du peloton (1,72 m pour seulement 58 kg).
Pourtant il mange beaucoup mais n'arrive pas à prendre de poids et il a pu en souffrir.
"Ça fait longtemps qu'il vit avec, il a eu ce complexe c'est clair. Mais il le compense par un âme de leader incroyable", explique Alexandre Abel, son ancien coach pendant trois ans chez AG2R qui a suivi l'étape depuis les Alpes avec le groupe qui prépare la Vuelta.
"Avec son côté gringalet, on a l'impression qu'il est fragile, mais il sait tellement ce qu'il veut. C'est un leader dans l'âme, insiste-t-il. Il avait un peu annoncé à certains des mecs ici qu'il allait en gagner une cette semaine. On pensait plutôt qu'il allait aller chercher celle de la Plagne mais c'est encore mieux au Ventoux."
- Le Tour n'était pas prévu -
"C'est vraiment fantastique de gagner ici sur le mythique Mont Ventoux", se félicite Jürgen Foré, le patron de Soudal Quick-Step.
Le successeur de Patrick Lefevere loue un "gros moteur" avec "la grinta d'un grand coureur". "Avec Valentin on a un jeune Français prometteur, mais aussi avec Paul Magnier dont le temps va venir aussi", ajoute-t-il.
"VPP" a posé ses valises chez Soudal Quick-Step cet hiver et, même s'il continue d'habiter à Chambéry, ça a été un grand changement de quitter Decathlon-AG2R, sa "deuxième famille".
"J'avais un peu peur de ce que j'allais trouver ici. J'ai été super bien accueilli", explique-t-il.
Au départ, il venait d'abord pour être le lieutenant du Basque Mikel Landa sur le Giro et ne se sentait pas d'enchaîner avec la Grande Boucle.
"Sur le Tour de France, il faut être à 110% de ses moyens pour pouvoir ne serait-ce qu'exister. Si c'est pour lâcher quand il y a encore 60 mecs dans le peloton, ce n'est bénéfique ni pour l'équipe, ni pour moi et mon expérience", dit-il à l'AFP en janvier.
Mais une fracture au coccyx en mars au Tour de Catalogne modifie ses plans. Exit le Giro et place au Tour, au service de Remco Evenepoel. L'abandon du champion belge la semaine dernière dans le Tourmalet est arrivé comme un coup de massue pour toute l'équipe.
Mais il a aussi libéré les ailes d'un jeune Français maigrichon qui a su prendre son envol mercredi pour devenir un de ces géants qui ont su dompter le Mont Chauve.
J.Lim--SG