
Les alpinistes à l'assaut des sommets méconnus du Népal

L'ascension de l'Everest ou de l'Annapurna reste le Graal pour la plupart des alpinistes, mais ils sont de plus en plus nombreux à partir de manière autonome, sans sherpa ni oxygène, à la conquête des sommets moins connus du Népal.
"C'est un immense défi. Le style alpin est totalement différent, que ce soit en termes de compétences ou de passion. L'aventure est bien plus intense", confie à l'AFP Benjamin Védrines, 33 ans, un des plus grands alpinistes français, après sa première ascension du Jannu Est (7.468 mètres) réussie la semaine dernière.
Le Népal, qui compte huit des 10 plus hauts sommets du monde, accueille chaque année des centaines d'alpinistes pendant les saisons d'escalade du printemps et de l'automne. Les expéditions sont une industrie lucrative pour le pays himalayen, notamment pour l'ascension des sommets de plus de 8.000 m. Mais partir à la conquête de montagnes de 6.000 et 7.000 m est de plus en plus tendance.
"Si vous ne vous intéressez qu'à l'altitude, le nombre de sommets à gravir est limité. Mais si vous élargissez votre horizon à des montagnes moins élevées, le potentiel est immense", affirme Paulo Grobel, alpiniste français et chef d'expédition.
Le Népal a délivré 1.323 permis pour cette saison automnale, en majorité pour les sommets les plus célèbres.
"Bien qu'ils culminent juste en dessous des 8.000 m, ils restent largement méconnus et sous-estimés", observe Benjamin Védrines, lui-même guide de haute montagne. "Mais il reste encore tant à explorer."
- "Possibilités infinies" -
Le Népal a ouvert 462 montagnes aux expéditions commerciales mais une centaine n'ont jamais été gravies. "Voir de jeunes alpinistes techniquement aguerris s'intéresser à d'autres montagnes, souvent plus intéressantes, est une évolution positive", se félicite l'Allemande Billi Bierling, directrice de l'Himalayan Database, qui recense les ascensions sur les hauts sommets népalais.
Elle "espère que cela se fera en toute sécurité, car c'est la priorité à venir".
Ce phénomène intervient au moment où certaines expéditions suscitent les critiques des puristes, qui s'élèvent contre la surpopulation et la marchandisation des sommets et leurs méfaits sur l'environnement.
Si les expéditions plus modestes permettent de répartir les alpinistes sur un territoire plus vaste, ce qui représente une source de revenus dans les vallées longtemps restées en marge de ce secteur, les défis logistiques restent de taille.
"Il est difficile de (les) atteindre. Voyager coûte cher et puis il faut marcher vers des zones où il n'y a pas beaucoup d'hôtels. Les secours sont difficiles", souligne Vinayak Malla, alpiniste et guide népalais.
En août, le Népal a supprimé les frais d'ascension pour 97 montagnes afin d'attirer les visiteurs vers des sommets moins connus que l'Everest ou l'Annapurna et de stimuler l'économie locale.
"Nous constatons un intérêt croissant pour les montagnes de moins de 8.000 m. Peu à peu, nous mettons en avant de nouvelles régions afin que, parallèlement à cet engouement, les infrastructures et la main-d'œuvre nécessaires puissent se développer", dit Himal Gautam, chef de la section alpinisme au département du tourisme du Népal.
Pour Paulo Grobel, c'est un nouveau chapitre de l'histoire des ascensions au Népal qui s'ouvre. "Il faut aller vers d'autres sommets, affirme-t-il, les possibilités sont infinies."
C.Park--SG