Le procès pour trafic sexuel du magnat du hip-hop P. Diddy s'ouvre à New York
La sélection du jury a commencé lundi au procès à New York de P. Diddy, figure centrale et influente du hip-hop accusée d'avoir mis son empire au service d'un système violent et sans pitié de trafic sexuel.
Au premier jour de ce procès, l'un des plus attendus de l'année aux Etats-Unis, de nombreux journalistes et curieux ont fait la queue pendant des heures pour entrer au tribunal fédéral de Manhattan, où le rappeur et producteur de 55 ans encourt la prison à vie s'il est reconnu coupable.
"Allons, ne soyez pas timide", a lancé le juge Arun Subramanian au premier groupe de jurés potentiels, qui doivent répondre à un questionnaire de 14 pages sur leur capacité à juger sereinement cette vaste affaire de violences sexuelles.
Le processus de sélection devrait durer une semaine et les premières plaidoiries de l'accusation et de la défense sont attendues le 12 mai. Le procès devrait s'étaler sur huit à dix semaines.
- Fêtes -
P. Diddy, de son vrai nom Sean Combs, est jugé pour trafic à des fins d'exploitation sexuelle, transport de personnes à des fins de prostitution, ainsi que des actes d'enlèvement, corruption et de violences regroupés sous l'inculpation d'entreprise criminelle.
Figure incontournable du hip-hop depuis les années 1990, il est accusé d'avoir mis son influence et son pouvoir au service d'un trafic qui obligeait des femmes à avoir de longs rapports sexuels avec des travailleurs du sexe.
Selon l'accusation, P. Diddy obligeait ses employés à distribuer des drogues aux victimes lors de ces marathons sexuels appelés "freak-offs", parfois enregistrés en vidéo.
En prison depuis son arrestation il y a huit mois à Manhattan, il croule en parallèle sous les accusations de violences sexuelles de plus d'une centaine de femmes et d'hommes devant la justice civile.
Une chute violente pour celui qui a amassé une fortune considérable depuis les années 1990 dans la musique, la mode et les boissons alcoolisées, et dont les fêtes opulentes attiraient le gratin du show-biz.
Le fondateur de Bad Boy Records, qui a eu sous son aile des stars comme la reine du hip-hop soul Mary J. Blige ou le rappeur The Notorious B.I.G. -- assassiné en 1997 -- clame son innocence. Il a refusé un accord de plaider-coupable proposé par l'accusation, dont les détails n'ont pas été révélés.
Le célèbre rappeur assure n'avoir eu que des relations sexuelles consenties. Son avocat Marc Agnifilo a évoqué un mode de vie "échangiste".
L'affaire secoue l'industrie musicale américaine, qui a plutôt échappé à la vague #MeToo, à l'exception de la vedette déchue du R&B R. Kelly, condamné à 30 ans de prison pour crimes sexuels en 2022.
"J'espère que (le procès) incitera d'autres victimes à se manifester", dit à l'AFP Caroline Heldman, cofondatrice de l'organisation Sound Off Coalition, qui lutte contre les violences sexuelles dans l'univers de la musique.
Selon elle, l'industrie musicale est encore un monde où se mélangent "les effets de la célébrité et du pouvoir sur les gens. Cela leur procure un déficit d'empathie, et le sentiment que les règles ne s'appliquent pas à eux."
- Aura -
Connu pour son image bling-bling, P. Diddy avait l'habitude de donner des fêtes somptueuses où se pressaient les célébrités sur la côte huppée des Hamptons, près de New York. Malgré une réputation violente, le natif d'Harlem, père de sept enfants, a longtemps maintenu son aura.
Son procès s'ouvre, comme un symbole, le même jour que le célèbre gala du Metropolitan Museum of Art (Met) de New York, rendez-vous mondain par excellence où il avait encore monté les marches en 2023, au milieu de dizaines d'autres célébrités.
La chanteuse de R&B Cassie, qui a été en couple avec Diddy, sera l'un des témoins les plus attendus. Une vidéo diffusée l'an dernier par CNN et captée par des caméras de surveillance avait montré Sean Combs se déchaîner violemment contre elle en 2016 dans un hôtel de Los Angeles.
Cassie avait déposé une plainte civile en 2023 contre le lauréat de plusieurs Grammy Awards, affirmant que son ancien compagnon l'avait soumise à plus d'une décennie de violences et un viol en 2018.
L'affaire s'était immédiatement réglée à l'amiable mais avait ouvert la voie à une longue série d'accusations d'agressions sexuelles et de viols contre lui.
E.Jung--SG